Vivre avec des limitations, même invisibles, est un parcours très particulier.  Il vous façonne et purifie votre ego.

Je jette un rapide coup d'œil à l'horloge ; avec un peu de chance, la pause sera bientôt là. Fatiguée, j'essaie de me concentrer sur la leçon et me demande pourquoi je m’impose cette souffrance ? Pourquoi est-ce que j'essaie de repousser mes limites et d'enrichir mes connaissances avec ce cours intense sur les plantes ? Depuis quelques temps déjà, j’ai décidé de ne plus être active comme guide. Mes jambes n'ont tout simplement plus la force de me soutenir tous les jours et la pression que je subi lorsque je "dois" être performante est trop élevée et ne profite pas à ma santé. Et pourtant, tous les mercredis soir, je suis assise ici, me cassant la tête à écouter et à essayer de trouver une place pour toutes ces informations dans mon cerveau confus.

Je regarde discrètement mes camarades étudiants...

Nous appartenons presque tous à la même catégorie d’âge. Beaucoup de personnes du groupe me connaissent depuis des années et connaissent les limites que je rencontre à chaque événement public. La plupart d'entre eux me guident de manière non-visible avec beaucoup de respect et cela me réchauffe le cœur. Pas tous bien entendu, le monde n'est pas un nuage rose où chacun comprend les besoins de son prochain.  Et en fait, je peux le comprendre... parfois ça peut être un vrai souci. Mes vilaines oreilles n'enregistrent pas toujours tout -malgré l'aide de mes appareils auditifs sophistiqués- et du coup je me retrouve comme une idiote à être en retard sur les évènements. Peut-être que certaines personnes pensent que je veux faire mon intéressante ?

Le fait est que rassembler ne serait-ce que la moitié des informations est déjà terriblement fatigant et que mon cerveau  a du mal à suivre la dynamique de groupe qui est toujours présente dans ce genre de cours.  Mais ma passion l’emporte toujours. Et lorsque, pendant les cours pratiques, je suis à genoux pour admirer une petite plante à la loupe, je trouve toujours un bras, en plus de ma canne, qui m'aide à me relever. L'adrénaline coule à flot et la connaissance et la beauté forment un mélange qui me rend euphorique.

Je réalise que je serai toujours un peu à part. Je ne peux tout simplement pas participer à toutes les activités qui sont proposées. Pour moi, il s'agit toujours de choisir... ou/ou, jamais et/et, et cela me fait prendre conscience que je passe à côté de belles expériences. 

Garder mon propre ego sous contrôle est, bien sûr, une nécessité absolue pour maintenir l'équilibre entre le corps et l'esprit. Il m'est impossible d'être la meilleure, et pour la battante que je suis, ce parcours n'est pas toujours facile. La passion et l’envie que j’ai d’augmenter mes connaissances (en particulier sur la nature) sont des moteurs très sain qui me poussent sans cesse à aller de l'avant et remplissent mes journées de manière saine. Mon propre jardin boisé est un petit monde qui m’offre des récompenses. Mes découvertes quotidiennes ici me donnent un sentiment de richesse incommensurable.

La recherche de solutions aiguise mes sens et l'étude elle-même entraîne ma mémoire. Le fait d’être confrontée à mes limites m’apaise et me fait trouver la paix dans la simplicité.

Se lancer des défis, tout en acceptant ses limites, .... c'est peut-être ça la clé du vrai bonheur.

Carine

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